Ma lettre au président Biya restée muette… sur la lutte contre la corruption (Intégralité)

10 mars 2014

Ma lettre au président Biya restée muette… sur la lutte contre la corruption (Intégralité)

Excellence,

L’honneur  est le mien de m’adresser à vous, en votre qualité de haute autorité de l’Etat et garant des institutions nationales, au travers de cette correspondance pour attirer votre attention, ainsi que celle de tous les compatriotes sur ce qui constituerait la cause de la dérive morale de notre nation. Je voudrais faire allusion  à l’insuffisance de la culture patriotique.

Permettez-moi d’embléebiyaaaa de déplorer la déficience du concept de « renouveau » qui vous est chère depuis votre accession à la magistrature suprême. En effet, nul ne peut se désolidariser des valeurs de « rigueur » et de « moralisation » qui fondent cet idéal, seulement l’omission de la variable patriotique nous a entrainé inexorablement vers une défiance à l’Etat dont une criminalisation du patrimoine public entre autre. Si l’on peut concéder au « renouveau » la prétention d’avoir tenu le pari de l’avoir, il reste à relever qu’il a timidement posé les jalons du « camerounais nouveau » ; l’infrastructure coure plus vite que l’éthique, l’égoïsme a fait reculer le champ et le chant patriotique. Je trouverai exhaustif d’égrainer le chapelet des tares qui, sans toute fois être anthropologiques, se sont greffés inconsciemment dans le gène des camerounais et ont atteint  aujourd’hui leur extase.

Nous avons déjà une identité répugnante aux yeux de tous, et d’ailleurs je nourris cette peur que nous ne soyons victime d’un « antisémitisme », qui ne pourrait être que légitime. Excusez Excellence pour l’hyper pessimisme, juste que nous sommes craints par les autres, nous devenons de plus en plus socialement dangereux parce que,  la nationalité camerounaise traine avec qu’elle l’identité de corrompu ou simplement de « malhonnête ». On a écarté la norme et normalisé l’écart. Vous me trouverai peut être excessif, mais le camerounais reflète le symbole du label dans lequel il a été moulé, d’ailleurs l’expression « feyman » est camerounaise. Comme je l’ai dit tantôt cette identité n’est pas anthropologiquement intrinsèque, c’est le contraire de notre nature originelle, elle a triomphé par l’inaction des hommes de bien.

Monsieur le président, il y a urgence d’une refonte de l’esprit camerounais et l’institution d’un esprit patriotique, je crois en ce que nous sommes et ce que nous devons être. Et, je pense que nous pouvons dépasser cette vulgaire tunique qui obscurcie notre vraie identité ; yes we can pour dire comme l’autre.

Avant d’aborder le substrat même de mon topo, accordez-moi votre patience afin que je revienne sur ce que j’entends par « ce que nous sommes et ce que nous devons être ». Pour faire simple, je dirai que nous sommes camerounais et nous devons assumer cette camerounité. Nous sommes une nation exceptionnelle en Afrique et l’Afrique est le berceau de l’humanité, alors nous sommes le condensé de toute une humanité, assumons le ! Le lieu n’est pas pour moi ici d’hyperboliser notre pays par rapport à sa miniaturisation et rester assis sur nos certitudes de « grande nation », mais c’est pour dire que nous avons ce que les autres veulent avoir à tout prix voire à tout les prix.

Certes nous devons être jaloux de notre liberté, mais je pense plutôt que chacun de nous devrait être d’abord jaloux  de ce beau  pays et ceci doit être une religion civique. Tout comme moi, vous vous posez souvent la question de savoir pourquoi nous sommes restés stables  jusqu’ici. Pour moi, ce n’est ni un effet de phobie, ni un effet de bonne gouvernance, ni,  pour être piétiste, d’un miracle divin, c’est tout simplement, ma foi, ce reflexe qui ressurgie à chaque fois que les esprits sont en transe pour nous rappeler que nous sommes camerounais. Nous sommes une nation exceptionnelle ! J’avoue ne pas être un érudit à même de bien conceptualiser notre idiosyncrasie exceptionnelle par rapport aux autres nations, alors je suis convaincu que vous êtes mieux outillé ainsi que d’autres compatriotes, théoriciens, pour bien idéologiser notre identité nationale.

Monsieur le président, nul ne peut nier votre détermination contre toute forme de prévarication et les camerounais vous soutiennent dans ce combat qui  interpelle la nation toute entière;  notre pays était déjà en voie de décomposition ! Cependant la bataille serait plus efficace si, en plus de la répression qui est approprier aux ainés en amont on associa en aval un système d’exorcisation de la pépinière que constitue les jeunes. Cette tranche, « Cameroun de demain », est virussée mais  heureusement, la gangrène est encore latente ; il y a donc une forte probabilité de la guérir, la jeunesse doit être l’une des principales cibles de lutte pour l’assainissement des mœurs publiques. La formule « magique » qui fait l’objet principal de cet exercice épistolaire auquel je me livre aujourd’hui se résume à un dosage idéologique et pédagogique devant être mobiliser pour stopper et éradiquer la dérive. Ce n’est pas une panacée, mais je crois qu’une société des valeurs ne peut faire l’économie d’une idéologie forte. Il faut inculquer aux jeunes leur identité exceptionnelle, ils doivent l’assumer et en préserver l’image devant les autres nations. Le vol institutionnel n’est rien d’autre que la conséquence de la faillite des valeurs et les insuffisances de l’appareil idéologique.

A ce sujet je commencerai par vous présenter, Excellence, mon total désarrois vis-à-vis de l’église qui a totalement oublier qu’elle était « l’église au Cameroun » et qu’elle devait parler plus du Cameroun au camerounais en leur rappelant sans cesse ce qu’ils sont (nation exceptionnelle) et ce qu’ils doivent être (assumer cette exceptionnalité). Au-delà de la spéculation, du culte de l’invisible et du miracle, nos églises qui rassemblent plus que les autres appareils idéologiques devraient profiter de leur capacité à mobiliser un large auditoire pour inoculer aux camerounais la fève patriotique et citoyenne. Il faut stimuler l’amour du pays qui est en hibernation dans les cœurs, que les églises prennent leurs responsabilités dans la construction d’une identité nationale, qu’elles suscitent en nous des émotions patriotiques : une église au service de la nation ! Que dire des médias ?

Je pense que les espaces occupés par l’exhibition en têtes d’affiches des prévaricateurs, le show organisé autour des démenties et des chantages médiatiques d’une certaine presse à gage doivent être convertis en pages de diffusion de l’idéologie camerounaise qui est son idiosyncrasie exceptionnelle. Les entreprises politiques sont interpellés par ce projet d’endiguement et d’épuration de cette « pseudo identité », fruit d’une socialisation déficitaire, devenue habitus et non la conséquence d’une trisomie originellement inscrite dans notre ADN. Les partis politiques ne sont pas au-dessus de l’unité nationale qui est l’une de nos valeurs sacrées, en tant que pédagogues, qu’ils fassent  intérioriser à leurs prosélytes la culture de l’adversité et non de l’inimitié tout en leur rappelant ce qu’ils sont et ce qu’ils devaient être.

Excellence, vous serez peut être surpris que je vous annonce que notre hymne national ne me fait couler aucune larme car il ne porte aucune spécificité, d’ailleurs que ses mots peuvent être transposés à n’importe quel pays africain et pourtant nous sommes différents. Pourquoi ne ressentons-nous pas notre exceptionnalité dans ce chant qui est supposé être patriotique c’est-à-dire nous rappeler que nous sommes camerounais avec une identité de choix ? Sans être subversif dans le propos,  il y a crise de symboles. Les jeunes ne s’identifient à personne et c’est grave ! Notre enseignement patriotique et citoyen dans des écoles est très précaire. Durant tout mon cursus jusqu’ici, je n’ai reçu aucune leçon spéciale sur le patriotisme or cela devrait être abondamment routiniser dans tous les niveaux d’études. Le vrai esprit camerounais, le prototype camerounais doit être érigé en doctrine civique.

Monsieur le président de la république, vous faites sans cesse confiance à vos compatriotes qui en retour ne cessent de fonder leurs espoirs en vous. Si vous aviez demandé à la jeunesse d’oser ; ce n’était nullement un effet de hasard, c’est parce que vous croyez en elle et c’est dans cette logique que je souhaite que vous considérez cette correspondance comme une modeste contribution d’un jeune camerounais. Penser toujours à une quelconque manipulation c’est décréter l’incapacité d’une jeunesse à s’assumer, certes il ne faut pas nier cette réalité dans notre champ politique, mais je pense que votre flair de discernement vous permettra d’écarter toute logique « apprenti sorcière » dans mon énoncé. Croyez moi excellence, ce qui manque à notre grande nation c’est la culture patriotique gage de la promotion et la défense de l’intérêt de la nation. Nul ne doute que vous prendrez acte et effet de cette lettre donc je vous exhorte   d’excuser la « kilometrie » et bon nombre de  défaillances que votre érudition corrigera.

« La terre n’est pas l’héritage de nos ancêtres, mais un emprunt à nos descendants ». Lester Brown

Excellence, espérant recevoir un accusé de réception de ma modeste contribution, je vous prie d’agréez l’expression de ma plus profonde considération.

 

Aristide Mono

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