Nord Cameroun: 2 morts et plus de 25 blessés lors d’un affrontement sanglant entre la milice du Lamido de Rey-Bouba et les commerçants révoltés par la dictature de ce chef
C’était mercredi dernier dans la commune de Touboro dans le département du Mayo Rey lorsque les membres du Fada (milice du Lamido), ont fait une incursion dans le marché local pour exiger le payement des impôts. Un recouvrement qui incombe pourtant à la mairie.
En effet, il faut préciser que la commune de Touboro avant de passer entre les mains de l’UNDP, est restée longtemps entre les mains du parti au pouvoir RDPC sous l’autorité du Lamido de Rey Bouba qui avait alors délocalisé les bureaux de recouvrement de la mairie vers sa concession (chefferie). Aujourd’hui la nouvelle équipe dirigeante est entrain de mettre fin à cette vielle pratique en ramenant l’administration locale à la mairie. Ce que n’entend pas le Lamido Aboubakari Abdoulalye Vice-président du sénat .
La milice de ce dernier est alors descendue dans le marché armée de flèches, elle a commencé à tirer sur les commerçants résistants. Ces derniers, révoltés ont décidé de répliquer, bilan: une dizaine de blessés et deux morts, des boutiques saccagées et une pick-up 4X4 emportée par les flammes.
Un des Dogaries du Lamidat justifie ces attaques en estimant que les membres du Fada ont apporté légitimement leur soutien aux anciens percepteurs (sous le régime RDPC) qui se sont sentis menacés par les nouveaux, installés par la nouvelle équipe communale (UNDP). Selon le sous préfet Alim Soulé cette escalade de violence est liée à la victoire du parti du ministre d’Etat Bello Bouba qui a humilié le sénateur, Lamido, dans son propre fief politique.
Dans tous les cas le calme est revenu la même soirée grâce à l’intervention du Bataillon d’intervention rapide (BIR) et des autorités publiques.
Le maire de la localité, Koulagna Nama, crie au complot des élites du RDPC, parti du Lamido qui tentent de rendre son séjour à la tête de l’exécutif communale difficile, surtout que ces incidents interviennent juste après le rejet par la cour suprême de la demande en annulation de la victoire de l’UNDP introduit par les camarades du Lamido.
Cet affrontement pose une fois de plus la problématique de la confusion entre le pouvoir traditionnel et politiques dans les sociétés africaines. Depuis la colonisation les chefs traditionnels ont toujours gardé leur pouvoir charismatique en dépit des évolutions politiques. Ils sont des potentats dans les régions de l’ouest et du nord Cameroun et croient avoir le dessus sur l’administration dans une logique de l’Etat seigneuriale où les chefferies sont des Etats en l’intérieur de l’Etat et concourent à la perpétuation du pouvoir de Yaoundé.
L’hyper puissance du Lamido de Rey Bouba n’est un secret pour personne, il a toujours géréla localité de Touboro comme une zone de non droit pour l’autorité administrative. A titre d’exemple, les nombreuses plaintes introduites par les peuples Mbororos pour dénoncer les exactions et abus de ce Lamido n’ont jamais inquiété ce dernier, le gouvernement est toujours resté inactif et muet. Les fonctionnaires sur place affirment éviter d’ « avoir le Lamido sur leur dos ».
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