Les chefs d’Etat Africains ont déçu Mandela
A l’annonce du décès de l’icône africain, le président Jacob Zuma n’a pas fait l’économie des valeurs qu’incarnait ce Baobab, il dira que Mandela était synonyme d’humilité, de paix, d’équité, de liberté, et aussi de pardon. Est-ce que les chefs d’Etats africains ont jusqu’ici suivi la voie de l’émergence de l’Afrique tracée par ce modèle ?
Il faut souffrir peut être d’une myopie politique pour tergiverser sur une telle réponse, les bilans et les profiles de ces barrons sont loin d’épouser ces valeurs que Mandela n’a cessé de défendre. On ne peut que s’évanouir devant le mépris que les présidents africains ont pour la vie humaine, entre coup d’Etat génocidaire de Paul Kagamé, l’autoritarisme brutal de Mugabe et les exactions de El Béchir. Mandela ne pouvait être que déçu par une telle posture peu humaniste, lui qui a donner toute sa vie pour la cause humaine.
On se demanderait si l’Afrique méritait un tel philanthrope ? S’il avait été en occident il aurait été la principale source d’inspiration des dirigeants même pour saluer l’œuvre du grand homme. Mais en Afrique rien ! Et rien de tout ce que Mandela représente comme boussole de l’humanité.
Demandez à Biya ce qui signifie liberté ou alors à son voisin Obiang Ngéma qui vient de découvrir ses talents de panafricaniste tardif ? Ils vous diront que Mandela, « oui il incarne la liberté mais nous ne sommes pas en Afrique du sud, bon chez nous les bantous il n’y a pas deux caïmans dans un étant ». Voilà une posture révoltante qui peut faire perdre la maitrise, on ne saurait parler de cécité mais simplement de mauvaise foi pour les chefs d’Etat africains d’incarner la liberté qui est une valeur fondamentale non pas seulement pour Mandela mais la libération de tout un peuple longtemps resté dans les mailles de la servitude.
L’Afrique pleure Mandela mais ses dirigeants sont restés insensibles en dehors, des rites théâtraux dans les discours et protocoles de tout genre pour vanter hypocritement l’Homme : « Mandela était une icône ! ». Or il ne suffit pas de le dire pour révérer sa mémoire mais de traduire en acte, de faire preuve de réappropriation des valeurs qu’il a toujours défendues et vendues au prix de sa vie. Et c’est ça pleurer et rendre hommage à Mandela ! Aujourd’hui, les chefs d’Etat africains honteusement bombent le torse en disant : « je suis gaulliste » et aucun n’affirme être « Mandeliste ». Ceci démontre d’une ingratitude notoire des dirigeants africains envers leurs grands Hommes ; d’ailleurs si Obama s’était présenté aux élections au Kenya il aurait été contraint à l’exil.
Le pardon, l’Ubuntu, voilà ce que Mandela a laissé aux autres sauf aux dirigeants africains, le large sourire de Ouattara devant un stade plein, exultant l’esprit conciliant d’un Homme ne pouvait que gâter la fête lors des obsèques de Mandela. Ce qui importe c’est le règlement de compte avec l’émergence bancale des « pro » et des « anti » en Côte d’Ivoire. Le corps du père de la nation camerounaise Ahidjo en exil au Sénégal subit jusqu’aujourd’hui les fougues de la vengeance de Biya. Combien de fois les chefs d’Etat africains ont fait preuve de pardon et de réconciliation ?
En tout cas ce sont les choses de Mandela ! Pourquoi donc jouer les hypocrites si vous pensez que les combats de Mandela ne vous servent à rien, on peut dire trivialement qu’il ne vous a servi à rien.
C’est un contraste, un terrible contraste que sur plus de 54 présidents africains aucun ne soit un « mandeliste » même dans le vernissage !
Le néopatrimonialisme et l’égoïsme ont pris le pas sur l’altruisme de Mandela, la dictature a pris le pas sur la liberté de Mandela, la vengeance a pris le dessus sur le pardon de Mandela, l’humilité rend hommage à l’arrogance… L’icône s’en va, renié et déçu par ses pairs africains puisque personne n’a jusqu’ici suivi ses pas.
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